Pour un service public national d’aide à l’autonomie

Les 2,5 millions de personnes qui vont dépasser 75 ans dans les prochaines années ne doivent pas être considérées comme des «parts de marché» à la merci des fonds financiers et des banques. Ces (futures) personnes âgées et leurs familles doivent pouvoir s’appuyer sur un service public national décentralisé. Le grand âge et la dépendance qu’il implique doivent échapper à l’impitoyable main de fer de l’accumulation du capital privé.

Cela appelle un nouveau projet humaniste de construction de maisons de retraite publiques et associatives à but non lucratif et dotées de moyens suffisants, financiers et en personnel. La création de centaine de milliers d’emplois qualifiés dans les EHPAD, avec comme objectif de tendre vers le ratio d’un soignant par résident doit s’accompagner d’un effort comparable afin d’encourager l’aide à domicile ainsi que la mise en place d’un statut pour les «proches aidants». Parallèlement à la construction de nouvelles structures publiques en lien avec les collectivités territoriales, les EHPAD dépendants de groupes privés doivent être mis sous tutelle.

Pour accompagner efficacement cet effort, la Sécurité Sociale doit être élargie et renforcée afin qu’elle puisse prendre en charge des personnes qui en ont besoin ainsi que doit enfin être votée une loi «grand âge» maintes fois promise. En réalité, c’est dans une autre logique de société qu’il faut s’engager : non plus soutenir les rapaces du grand âge comme ORPEA mais favoriser en toute chose l’intérêt général humain.

Marie-Claude Manservisi

Ne pas laisser nos aînés dans la main des marchés

Le marché du grand âge, ça peut rapporter gros !
Quand un système économique utilise le vieillissement de la population comme source de rentabilité financière, la société atteint un insupportable niveau d’inhumanité. Une logique avide et vénale a produit le scandale ORPEA, qui dévoile au grand jour les pratiques des maisons de retraites privées tombées aux mains de grands groupes financiers où la rentabilité des capitaux investis l’emporte sur toute considération humaine. Là encore les pouvoirs successifs ont organisé la mainmise des groupes privés sur le grand âge et la dépendance.


Faites l’expérience : recherchez sur Internet des renseignements sur les maisons de retraite. Les premières informations qui s’afficheront sur vos écrans seront des publicités pour vous inciter à investir votre argent dans ces sociétés financières qui gèrent des EHPAD. On ne vous parlera pas de conditions d’accueil, de qualité de soins mais de placements dans une résidence sénior pour un rendement financier de 5,4 % net d’impôt.

Le message est clair : investir dans la vieillesse peut rapporter gros, au point d’être aujourd’hui parmi les investissements en bourse les plus juteux. Le vieillissement des personnes, si possible en mauvaise santé, est devenu un marché financier qui « pèse » aux alentours de 150 milliards d’Euros.


Ce magot aiguise l’appétit des puissances d’argent qui ont créé ces groupes afin de s’enrichir sur le dos des familles, des résidents et des personnels ; un butin qu’ils s’empressent de cacher dans les paradis fiscaux pour échapper à l’impôt et donc au financement des biens communs. Et ce au détriment des services publics de santé et de solidarité.

Un Etat complice :
Un certain nombre de dirigeants politiques et de membres du gouvernement peuvent bien s’offusquer ou se boucher le nez : pure hypocrisie ! Ils sont responsables de ce système, quant ils ne l’ont pas encouragé.


Cette situation est en réalité le résultat de décisions politiques qui ont accordé des autorisations d’exercer à ces groupes, autorisations délivrées par les agences de santé avec le soutien complices de ministres et d’ancien ministres devenus « conseillers économiques ». En restreignant l’offre – en particulier publique – alors que la demande explose avec le vieillissement de la population, l’Etat favorise l’augmentation continue des tarifs d’entrée en EHPAD. D’autre part, les groupes privés se gavent à la source d’aides publiques distribuées sans contrôle sérieux pour les missions de soins. Ces structures privées bénéficient d’une réduction de cotisation sociales sur les salaires des personnels jusqu’à 1,4 smic, ce qui constitue une distorsion organisée par rapport au secteur public et encourage les bas salaires.